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écrit-vin anonyme

26 avril 2012

Le manteau statufié

La nef sur une toile blanche pâlit.
Elle file comme un funambule qui dessine son fil ; ceux qui dorment dedans n’ont que les yeux fermés mais ont l’esprit béant.
Sous la sphère givrée, sur le globe gelé, eux aussi pâlissent. Mais ce n’est pas de froid.
La peur est un manteau de laine qui terrasse la glace.

Enfin la nef a passé cette ligne formée sans matière,
Mais ceux qui y dormaient, sans la crainte du froid, d’eau se sont statufié.
Une seule, parmi eux, à foulée la jetée.

Désolée, triste et résolue,
Elle passe la grande porte surchargée de diamants et traverse les rues tapissées de satins.
Mais que faire, épuisée, sinon s’agenouiller et tendre les mains.

Aucun mur cette nuit et pas de cheminée ;
Elle pâlit. Le froid est celui de la nef et le manteau de laine s’est dissipé dans l’air.
Éveillée, les yeux écarquillés et l’esprit contracté, elle va, nue, embrasser la pierre polaire d’une statue au nom de désespoir.

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25 avril 2012

Mon oncle

Mon oncle qui, le regard éteint, scrutez l’air face à vous et le flou de vos pupilles… qu’attendez vous ? Assis sur une pierre, les genoux sous les coudes, vous écoutez votre ouïe, n’entendez rien et n’en avez conscience. Vous confiez à votre concentration un devoir d’introspection ; celle-ci, plus que jamais, connaît la distraction… sans jamais la comprendre. Mon oncle, la perception ne se perçoit, son miroir est une ombre. Mon oncle, cette inattentive attention est-elle celle de celui qui attend et n’attend rien ? Vous analysez la seconde pendant la seconde même et ne comprenez d’elle pas même sa fugue. Nulle attente et non plus d’attention. Sondant avec l’œil d’un rapace, mon oncle, êtes-vous néanmoins ce rapace. Ni la désespérance ni la jubilation, ni le sursaut ni la surprise, ni le pincement ni le frôlement. Mon oncle qui, attendant attentivement, n’attendez rien ni n’entendez.

16 avril 2012

La sécheresse des larmes

     Si pour les stoïciens
Les siècles ne sont rien
Que l’écho d’un instant ;

     Pour les parménidiens
Le mouvement n’est rien
Que la scission du vent ;

     Pour démocritéens
La bêtise n’est rien
Qu’horizon permanent ;

     Mon pauvre monde humain
Alors, qui ne vaut rien,
Assèche-toi le sang.



             Ri Héraclitéen !
             Même ton pleur, un temps
             Subit le changement.

31 janvier 2012

Diffraction

Ce qu’un été j’ai vu, trouvé sur le bitume :
Une bille ; une bille semblant si banale
Que fou, je l’ai laissé rejoindre un fond d’écume,
Sans m’en soucier de par la saison automnale.
Mais voilà qu’à l’hiver et par dessus le pont
Je vois briller ma bille au travers de la glace.
J’attends et il semble que mille saisons passent.
Mais quand vient poindre le printemps, à l’horizon,
Après les mille hivers sans jamais d’équinoxe,
Discernant dans le fleuve et parmi les rayons
Ma perle qui s’embrase ébouillantant les fonds ;
Je plonge la rejoindre et ne rejoins qu’un roc.

19 décembre 2011

Ô neutre ennemi!

Vois ! Il pleut la neige, il neige la pluie

La goutte en flocon métamorphosée.

Voici donc l’idée qui naît à ma pensée :

Demain au balcon quand fuira la nuit

Plutôt qu’un buisson, je verrai fantôme.

Mais un doux fantôme, un comme l’enfant

Amusant la peur, caché de draps blanc.

Spectre souriant qui quitte l’automne.

 

C’est le temps qu’il fait, le temps dans l’espace,

L’espace changeant l’espace d’un temps.

Qu’est-ce que le temps ? Fragment de néant.

Qu’est-ce que l’espace ? Une simple trace.

 

Je ne suis pas dupe ! Ô mensonge trouble !

Je vois la beauté ! Qu’est-elle vraiment ?

Souvenir, mémoire ou bien jugement ?

Je vois la beauté ! Tu n’en vois qu’un double.

 

Que dis-tu ? La beauté ne serait qu’artifice ?

Ô monstre que dis-tu ? Je ne mange qu’un vide ?

Rassure-toi mon cher, la laideur est livide

Son visage est le même. Ignore tous caprices.

 

Explique-moi alors pourquoi en mon esprit

J’en ai une vision et de nombreux critères ?

Pourquoi ma conviction est partout sur la terre ?

C’est qu’elle naît bien sûr du fond de ton esprit

Et de tous ceux osant porter le nom d’humain.

Réelle la beauté que dans ton monde à toi

Et pas même la même entre des jumeaux roi.

Cette matière là change entre chaque main

Mais ne côtoie jamais les bras de l’univers

Et l’astre le plus beau n’a d’éclat que le tien.

Dans l’espace et le temps ne serait-elle rien

Et rien que solitude où partage n’adhère ?

 

Rien, en effet mon cher. N’est réel que le mot,

Que l’essence du temps, de l’espace et du beau.

Si tu veux partager le charme de ton âme,

Devient dès lors poète et réinvente un charme.

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18 décembre 2011

Les oiseaux gris

Que fais-tu donc ainsi ? Mais qu’es-tu devenu ?
Pourquoi parmi le flot d’oiseau fade et brailleur,
Ne contemple-tu plus ceux qui semble d’ailleurs ?
Les allures de fées ne sont-elles donc plus
Celles qui d’un regard foudroyaient ton iris ;
Et d’un battement d’aile au battement de cœur
Remaniaient ton esprit en onde sans torpeur ?
Cet Eden infernal aux délicieux supplices ;
Où est-il ? Où est-il ? Tu le chérissais tant.
La crise était la joie et l’insondable un astre ;
Sentir ton corps en cendre et ton cœur un désastre
Donnait à ton esprit des chemins si tentant.

 

Tu veux savoir ? Mais moi-même ne comprends plus !
Un coup d’œil au dehors vers la foule d’oiseaux
Je ne vois de colombe et ne vois nul corbeau.
Ils sont tous gris, médiocre, et fade, et plat, et nu !
Moi-même, ce Toucan insatiable, mon bec,
Mon pauvre bec, hélas, délavé par la pluie
N’a de chants à donner qu’aux mouettes de l’oublie.
Je n’ai plus de régal ; les plumages sont secs.
Ils ont le corps rugueux ; je les voudrais de soie.
« Exotiques oiseaux qui jonchaient l’Amazone
Aujourd’hui n’êtes plus que des pigeons aphones ! »
Ils volent comme des oies, mais leur vol me déçoit.
 

Voyons, ce n’est pas eux ! C’est toi qui te méprends !
Ceux que tu traites là n’ont fait métamorphose.
C’est toi, ô daltoniens, toi qui en est la cause.
Ta vision se dégrade, poète vieillissant !
Ridé bien avant l’âge, es-tu bien trop lucide ?
Le monde d’onirisme où tu trouvais asile,
Le refuge de songe accueillant ton exil,
Vois le s’effondrer d’un chaos insipide.
« Toi, l’homme clairvoyant, tu es poète aveugle !
Tu quittes le Parnasse et chutes de Pégase.
Vas-t-en vers l’horizon chercher un vain présage
Là-bas ton dernier ver, la honte que tu beugles ! »

 

Non ! Non ! Ne dis pas ça ! Je ne veux pas partir.
Ne me rejetez pas ! Pardonnez-moi poètes.
Gardez-moi parmi vous, je payerai ma dette.
Je ferai la fusion de raison et désir ;
J’irai chercher l’écume au fin fond des déserts ;
Une once de lumière au profond des cavernes ;
Un grain de sécheresse au centre des citernes ;
J’irai chercher au vide un concret pour l’éther.
Ne m’abandonnez pas, je veux votre soutien.
Vous verrez, vous verrez ! J’accomplirai ma tâche !
Qu’importe si du ciel même les dieux me crachent ;
J’irai chercher le tout là où n’est que le rien.
 

Bête ; ce n’est pas ça qui te fera poète.
Regarde ton esprit, il n’a aucun volume.
Il croit que tout s’éteint et que tout se rallume.
Dans le plumage gris des oiseaux et des bêtes
Non, tu n’extirperas aucune plume bleue.
Mais tu peux la créer, tu peux l’y insérer,
Transformer l’oiseau gris en un chien de berger.
Tu peux briser la règle et trois serait un deux,
Tu peux courser le monde en restant sur le seuil,
Tu peux créer un mot, un sens et un espace,
Tu peux donner au cube une septième face
Et donner à la vie la forme d’un écueil.

 

Alors je vous supplie ! Ne me délaissez pas.
Le monde de demain sera un autre monde.
Voyez comme la neige recouvre même l’onde
Ne conservant qu’un nom pour chacun de ses bras.

17 décembre 2011

Malédiction sur le poète

Je vois sur moi crouler des nuées de corbeaux.
Leur griffes dans mon cou, dans mon torse leur bec,
Chacun, son tour venu, se nourrit de mon être.
De mes mots, nul ne fait quelconque métaphore.
Je deviens fou, je crois,
Et surtout je le vois.

Je sens la joie terrible et les jubilants maux.
Un Enfer qu’enjolive un iris de poète,
Et l’Eden que ternit le regard du poète.
Mais de mes mots, pourtant, pas le moindre oxymore
Etais-je fou déjà ?
Ne le savais-je pas ?

Trouble de mon esprit qui sévit depuis l’aube.
Trouble de mon esprit qui s’en prend à ma tête,
Trouble de mon corps qui s’en prend à ma tête.
Trouble. Et me croiriez-vous ? Je ne fais d’anaphore.
Trouble comme je vois,
Trouble comme est ma voix.

Pendez-moi ! Je préfère un supplice si beau.
Errer dans le désert, sans peau et le cœur sec,
Sombrer sous le bateau du royaume des spectres.
Pas la moindre ironie, c’est le clou de mon sort.
Pourtant croiriez-vous ça ?
…Un pléonasme là ?

21 octobre 2011

Mal à l'âme

J’ai dans la tête, qui galope et ricoche contre les parois cérébrales, un mal inguérissable.
   Ça ressemble à la haine. Quand j’y pense… quelle haine sereine.
Je l’entends calmement dans le cœur des tympans. Elle clame calme le mépris pacifique.
   Cette envie, vous savez, que tous ne soient plus là ; que chacun ne soit plus.
« Ô toi ! Que fais-tu là ! Là dans ce monde, ce monde las. Ce monde, il est à moi. Disparais ! »
   J’ai dit. L’autre fait. C’est rapide. Sans douleur. Sans colère.
« Tu m’irrites. M’entends-tu ? Tout m’irrite. M’entend tout ? Tu mérite le vide. Sois vide ! »
   J’ai dit. L’autre fait. C’est rapide. Sans douleur. Sans colère.

Oui… c’est ainsi. J’aime ce que je hais. Et va s’verre ci.
   J’ai dit quoi moi? Sais plus. M’en fou.
Disparais ! Disparais ! Sois vide. Sois trou.
   Au jamais au revoir, monde immonde.
Je coupe le fil. Tombes. Tombes et quitte l’attraction.
   Quitte le manège autour de l’astre.
Tombes dans le vide blanc. Dans le trou noir. Tout noir.

Je crois que j’ai ce que je hais. Ce que je hais croit et veut sa mort comme je veux la sienne.
Il veut ma suppression comme je veux la mienne.
« Ô moi ! Que fais-je là ! Là dans ce monde, ce monde las. Ce monde, qu’il est moite. Disparais-je ! »

28 septembre 2011

Chambre froide

Comme la fenêtre au matin après la pluie,
Comme les rayons flous pénétrant dans ma chambre,
Comme les draps frisquets et sans plis de mon lit,
Mes lèvres et mes joues comme un mois de décembre.

Ô murs !
Ô murs !
Vous qui fixez mes tableaux et mes gestes,

Vous qui prenez poussière au lieu de prendre hiver,
Vous qui ne dormez pas quand le sommeil me leste,
Que suis-je dans ce creux, sous ce plafond de pierre ?
Pourquoi mon cœur à mal comme un banal satyre ?
Pourquoi mon vert iris et ma noire pupille
N’ont-ils un peu de rouge et le reflet d’un rire ?
Pourquoi suis-je assommé par la mélancolie ?

Je voudrais être une hydre ! Je voudrais être hybride !
Un double doux mélange entre l’amour et l’ange !
J’envie les fous bavant capables de s’aimer !
Capable d’embrasser son soi camisolé !
J’envie  les animaux que l’esprit ne dérange !
Je veux suivre quelqu'un dans la folie des rides.

Oui…

Je veux accompagner une naïade, une oréade,
Du lit de sa rivière au lit de l’effusion
Jusqu’au lit froid et dur qui suivra la noyade,
Dans l’abyssal tombeau des corps en collision.

23 septembre 2011

Croisement

Sa tête est baissée.
Le ciel est fait ainsi que sa face est dans l’ombre.
Le soleil placé tel qu’elle à du voir mon ombre.
Sa tête n’a bougée.

Pourtant, son regard comme une virgule
Un temps s’éleva, suivi d’un coin de lèvre
Qui croisa ma prunelle. Mais les instants se brulent
Et nos timidités en ont fait des orfèvres.

J’ai pu voir dans son œil un iris pluvial
Des gouttes de savon d’un blanc matinal.
J’ai aperçu, pincée, qui rougissait de honte
La pointe de sa bouche et les plis qui s’y montrent.

Mais cette bouche comme une lune
Et ce regard comme une rune
Ont disparu, emportant le nom qui les portait.
Je ne les ai revus que dans un rêve surfait.

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écrit-vin anonyme
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écrit-vin anonyme
  • Lis-tes-ratures, ces drôles de jeux de maux, qui donnent des mots de tête... Boire les mots c'est tout un art, en devenir dépendant, et c'est trop tard. Mélanger l'abstrait et le concret, lire des poèmes enchanteurs, des écrits fabuleux…
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